texte de Inda Intiar / photos de Haqq Brice
L'automation et la vie des fermiers
et de leurs vaches
translation de Georgette LeBlanc
Vache à l’NBEX
Ce n’est pas un secret pour personne : l’élevage laitier est un travail difficile. L’agricultrice Wanda Shuttenbeld avait l’habitude de traire les vaches dans la salle de traite de sa ferme familiale à Maugerville au N.-B.
« Nous allions à la grange, nous devions attraper toutes les vaches, les mettre dans un corral, fermer la barrière et toutes ces vaches attendaient là d’être traites. C’était à six heures du matin, et à six heures du soir. »
Sa ferme compte 110 vaches, dont 60 produisent du lait. Chaque traite dure de deux à trois heures. Certains jours, ils devaient faire appel à du personnel pour l’aider. Mais en 2012, lorsqu’elle et son mari ont vu d’autres agriculteurs locaux introduire l’automation, ils ont décidé de suivre le mouvement. Ils ont installé un robot de traite Lely, qui leur a permis de trouver un équilibre entre vie professionnelle et vie privée.
Notre fils cadet Harri pratiquait des sports de compétition. Nous ne pouvions jamais nous rendre aux matchs de foot ou de hockey », explique-t-elle.
Après l’installation du robot, « nous avons pu voir tous les matchs de hockey et de soccer et assister aux tournois. L’un d’entre nous pouvait rester à la maison et gérer la ferme grâce au robot de traite.
Wanda a amené trois vaches de sa ferme pour présenter le robot Lely à l’exposition provinciale du Nouveau-Brunswick (NBEX) de cette année. Le mandat de la NBEX consiste notamment à présenter au public le secteur agricole de la province.
Les vaches l’adorent. Elles n’ont jamais besoin d’être poussées pour aller à la traite », explique Wanda. « Elles boivent quand elles boire de l’eau. Elles mangent du couloir d’alimentation quand elles le souhaitent. Elles se couchent quand elles le veulent, sortent quand elles le veulent et socialisent quand elles le veulent. Et quand elles veulent se faire traire, elles vont au robot ».
Chaque vache laitière sur leur ferme est équipée d’un collier muni d’un transpondeur. Lorsqu’une vache entre dans le système, le robot la reconnaît. Il enregistre les informations à chaque vache, de sa date de naissance au nombre de veaux qu’elle a eus. Le robot sait dans quelle phase de lactation se trouve la vache, quelle quantité d’aliments elle a besoin et combien de fois par jour elle doit être traite.
« Le robot sait si elle est en chaleur, si elle mange suffisamment de céréales, la température de son lait, si elle a perdu du poids et sa rumination. C’est comme si vous aviez un vétérinaire dans votre étable. »
Le robot Lely envoie le lait dans une cuve réfrigérée où il est stocké. Ce lait est ramassé tous les deux jours par des camions qui le transportent jusqu’à Northumberland Dairies ou Dairytown pour y être traité.

Wanda Schuttenbeld et vache à l’NBEX

L’impact sur l’industrie
L’automation pourrait soulager l’ensemble de l’industrie laitière qui approvisionne une population croissante dans tout le Canada.
En ce qui concerne les pénuries de main-d’œuvre et de compétences, l’agriculture est un secteur qui connaît déjà une grave pénurie. La pénurie de main-d’œuvre devrait s’aggraver avec 100 000 emplois vacants dans le secteur d’ici 2030, selon le rapport sur le marché du travail 2023 du Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture (CCRHA).
Wanda a la chance que son fils Harri soit intéressé par la reprise de l’exploitation familiale. Mais pour les agriculteurs qui n’ont pas de plan de succession ou qui ne trouvent pas de personnel, l’automatisation peut être utile.
« La traite physique est difficile et prend beaucoup de temps, sans parler de l’interruption des activités naturelles de la vache. La traite automatisée a permis aux gens de rester agriculteurs plus longtemps s’ils n’ont pas la possibilité de faire reprendre leur exploitation par quelqu’un d’autre », explique Wanda.
Environ une exploitation agricole sur cinq au Canada utilise les systèmes de traite robotisés, selon le recensement 2021 de Statistiques Canada sur les technologies utilisées dans l’agriculture.
Karen Versloot, productrice laitière à Keswick Ridge au Nouveau-Brunswick, qui siège au conseil d’administration de Holstein’s Canada, remarque d’autres tendances technologiques dans le secteur.
Les tests génomiques et l’accès à des informations génétiques plus détaillées aident les agriculteurs à élever des vaches qui peuvent vivre plus longtemps et produire plus de lait.
« Cela réduit notre empreinte carbone, car même la population augmente et que nous devons toujours produire suffisamment pour nourrir tout le pays, nous n’avons plus besoin d’autant de vaches pour le faire. »
À l’avenir, Karen s’attend à ce que les caméras et l’IA soutiennent le travail des classificateurs, qui aident les agriculteurs à comprendre comment améliorer la génétique des vaches pour qu’elles puissent vivre plus longtemps.
Depuis 30 ans qu’elle est agricultrice, Karen a vu des changements « à pas de géant ».
« Je ne sais pas si nous avons atteint le seuil de la quantité de lait qu’une vache peut produire. Je pense que nous y sommes assez proches du maximum qu’une vache peut produire. »
« Nous avons des caméras qui nous permettent de surveiller les activités des vaches, de garder un œil sur les parcs de vêlage et sur la circulation des vaches pour nous assurer que les équipements fonctionnent correctement. Dans l’élevage laitier, il faut toujours quelqu’un dans la grange comme il y a encore plusieurs tâches à accomplir, nourrir les veaux, racler les lits, scier le bois, l’alimentation des veaux, le fonctionnement des racleurs. Chaque exploitation laitière est différente. La traite automatisée ne remplace pas tout le travail, mais c’est une aide précieuse. » Wanda réfléchit. « Je ne sais pas trop où nous allons maintenant. Je pense que nous sommes dans une bonne situation pour les animaux et les agriculteurs à l’heure actuelle. »
Malgré toutes les nouvelles technologies, la plupart des exploitations sont restées familiales et se concentrent sur le confort et la santé des vaches.
« La plupart des producteurs laitiers sont comme ça, tout tourne autour de la vache. Vous voulez les rendre heureuses et elles vous rendront heureux en produisant un lait de qualité», dit Wanda.
Le fils de Wanda, Harri, et sa compagne Anna viennent d’avoir un nouveau bébé. L’automatisation de leur exploitation leur permet d’apprécier cette nouvelle phase de leur vie. Elle rend également l’élevage laitier plus attrayant, car ils se préparent à reprendre l’exploitation à l’avenir. 🐄

Harri Schuttenbeld à NBEX
Cette pièce peut être trouvée dans Hiver 2025, Edible Maritimes #13
Inda Intiar est une écrivaine, une conteuse, une personne connectée et une facilitatrice qui apporte une perspective mondiale en ayant grandi dans de plusieurs pays. Inda adore voyager et essayer de nouvelles expériences et saveurs. / Inda Intiar is a writer, storyteller, and facilitator who brings a global perspective from growing up across multiple countries. Inda loves travelling, and trying new experiences and flavours. / @firenationexplores
Haqq Brice est un photographe et artiste multidisciplinaire basé à Moncton qui exprime sa vision à travers son art et sa créativité. Haqq Brice is a photographer and multidisciplinary artist based in Moncton, whose art and creativity are used to express his vision. /
Georgette LeBlanc est écrivaine et traductrice. Elle est chargée de cours à l’Université de Moncton où elle enseigne la création littéraire. / Georgette LeBlanc is a writer and translator. She is currently a sessional instructor of creative writing at l’Université de Moncton.
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